Emargua paradis de la glisse

Publié le par wandess

Pour ceux qui voulaient prendre la route de l’océan, il y avait deux chemins. L’une d’elle menait à la grosse station située vingt bornes plus loin, et donnait le droit à une longue promenade le long de la mer déchaînée. La mer ici était toujours déchaînée, dangereuse, les gens du coin n’avait que les baïnes à la bouche. Ces étonnants instants ou la mer paraissait plus calme et attirait les nageurs vers la profondeur des eaux et loin vers le large. Puis tuait. Les rouleaux et les vagues n’étaient pas ce qu’il y avait de plus dangereux malgré leur aspect impressionnant. D’ailleurs la réputation de la ville s’était construite grâce à elles. Ce n’était rien, ici, avant que les surfeurs du monde entier en fassent une de leurs Mecque. Comme dans le grand ouest américain, la ville voisine s’était construite sur cet or, bleu, et elle était sortie de terre comme un champignon. Des avenues avaient été tracées à la va vite, des hôtels construits en quelques mois, et des restaurants s’étaient installés face au vent, face à l’océan, au sommet de la dune, afin de surplomber cet océan déchaîné offrant un spectacle fascinant pour les touristes. Seules quelques baraques anciennes renseignaient sur la passé de cet endroit. Tout était récent à l’exception de trois petites dizaines de maisonnettes en pierre. Les nouvelles habitations, mais surtout les boutiques et les restaurant avaient été fabriqués au plus vite, souvent sans permis de construire. Posées, en bois, directement sur un terrain. De cet aspect mercantile se dégageait finalement un charme immense. Emargua était une ville de pionniers. Une ville de surfeurs, de paumés ayant fait fortune, de types qui avaient flairé le bon filon. Même l’hiver les affaires ne s’arrêtaient pas.

 

Je suis resté un moment à fumer en regardant des types chevaucher des vagues. Et des minettes faire de grands yeux. Le vent fumait la moitié de mes clopes. J’ai fini par aller commander une bière et une barquette de frite. Je suis resté assis à une table. L’air ici avait de quoi rendre fou, violent et toujours chargé d’invisible gouttelettes d’eau salée qui, comme de la transpiration, collaient à la peau et aux vêtements. Le vent ne faiblissait que très rarement, de quoi se demander où était passé le soleil, même s’il brûlait en réalité toujours aussi fort. Il faisait froid en comparaison à l’intérieur des terres que j’avais quitté quelque temps plus tôt. Un vent froid qui coute que coute déplaçait la barquette de frite sur ma table en la faisant glisser comme une malheureuse serviette en papier. Dans le coin, même en été, les parasols des terrasses des cafés ne ressemblaient à rien de connu. Ils semblaient avoir été conçus pour faire de longs voyages dans l’espace, ou faire office de parapluie nucléaire.

 

J’avais encore un peu de temps devant moi, je suis allé faire le tour des baraques à fringues. Stan, un type qui recueillait toute l’année les chats abandonnés à la fin de chaque été par les vacanciers, avait une boutique sympa dans mes souvenirs. J’avais envie de savoir s’il était toujours là. Sans surprise il n’avait pas bougé. Il vendait toujours des bermudas branchés et colorés, des chemisettes cool et autres accessoires pour rentrer surfer sur la capitale, mais il s’était légèrement agrandi. Son magasin était autrefois de la taille d’une caravane. A présent il fumait des pétards en régnant sur un demi Mc Do.

 

Il avait été un des premiers à flairer le filon de la glisse. A cinquante ans passés il n’était toujours pas rentré dans le rang. Ses cheveux avaient juste encore blanchi. Je me souvenais qu’il avait ouvert à l’époque sa boutique en revendant l’affaire de son père qui venait de clamser. Cela avait été moyennement apprécié par quelques personnes. Cela dit ça avait soulagé pas mal de monde qu’un type comme lui, ce qui était perçu par beaucoup comme un junkie, ne reste pas à faire affaire dans les pins.

 

Autrefois icone locale, le temps était passé. Il y avait bien d’autres Stan à présent, et seuls les anciens se souvenaient qu’il était là avant tout le monde. Qu’il avait pour ainsi dire été le premier à se présenter face à cet océan avec une planche de surf entre les mains.

 

Je bavardais avec lui économie locale lorsque Mindy entra. Vingt-quatre ans. La meilleure amie de Jessica. Elle vint presser ses seins contre lui, mettre ses fesses entre ses mains et l’embrassa à plaine bouche.

 

_ Je ne te présente pas ma femme, rigola Stan, Vous vous connaissez je crois !

 

 

Publié dans Altencia (Fiction)

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